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L'envie de narrer cette histoire part de là...

L’envie de narrer cette histoire part de là…

Ceux qui me suivent sur Twitter savent que je twitte pas mal de connerie (mais vraiment pas mal :p), parce que, après tout, c’est un lieu de détente, même s’il faut parfois être sérieux de temps en temps. Et ce soir, en tweetant cette connerie, m’est revenu en mémoire un épisode de ma jeune vie d’adulte.

C’était il y a longtemps (A long time ago, in a galaxy far far away comme ils disent), au début des années 90. J’allais passer mon bac, et comme passe-temps, je faisais du tir sportif. J’étais même moniteur, au Club de Tir de Paris et de la Police Nationale. Allez, un peu d’autopromo, j’ai été le plus jeune moniteur de tir validé par la FFTir. Mais pourquoi je parle de tout ça… Parce que cela va avoir toute son importance.

Souvenirs, souvenirs...

Souvenirs, souvenirs…

Là ça cartonnait sévère (et ça mouftait pas quand je faisais cesser le tir :p)

Là ça cartonnait sévère (et ça mouftait pas quand je faisais cesser le tir :p)

C’était un mercredi après-midi, je matais une série (déjà), vautré sur le canapé du salon, chez mes parents (oui je sais, au lieu de bosser mes cours et préparer mon bac). La sonnette retentit, et à la porte se présente deux inspecteurs de police (quand je vous dit que c’était y a un bail !) et deux gendarmes en uniforme (le même que Cruchot, mais en bleu, voilà pour les détails). Avec à la main une commission rogatoire ordonnant la perquisition de l’appartement.

Euh oui , vous avez bien lu. Une perquisition. Chez moi. Mais pourquoi ? Pour le moment, ma mère et moi n’en savons rien. Les gendarmes s’occupent de la maison, chambre des parents et de la frangine, les deux clampins flics de ma chambre. Bon si les deux mecs se la joue Stanislas Borowitz et Josselin Beaumont dans leur attitude, on est quand même loin du niveau de Bebel. Parce que la perquisition de la chambre à Gilloux, c’est version mauvaise série US, avec les affaires des tiroirs renversées de partout, et jetées n’importe où sur le lit. C’est aussi les pitoyables mauvaises tentatives d’intimidations en trouvant quelques magazines osés dans un tiroir

Bon, tu nous dis tout ou on montre ça à ta mère

On ne va pas faire de commentaire hein… Cela dit, vu le niveau, je me suis quand même permit de les remercier. Et j’ai dû ajouter, face aux regards bovins incompréhensifs…

Bah oui, ça fait 15 jours que ma mère me demande de ranger ma chambre. Là je crois que je n’ai plus le choix…

Bref, après ces échanges d’un haut niveau, la perquisition se termine, et tout le monde prend la direction de la gendarmerie de MaVille. Oui, à l’époque, nous avions un commissariat et une gendarmerie. Arrivés là-bas, les interrogatoires ne commencent pas de suite. Il semble que la décision de confier l’affaire aux services de police (nnnnaaannn pas ça !!) ou à la gendarmerie n’ait pas encore été actée. Entre temps, sans pression, l’un des poulet me demande tranquillement d’avouer que c’est moi qui ait tiré par la fenêtre.

Parce que oui, nous savons maintenant de quoi nous, enfin JE, suis accusé. D’avoir à deux reprises, deux samedis matin, tiré par la fenêtre de ma chambre vers l’immeuble d’en face, au moyen d’une arme de calibre 22 LR. Et comme on avait deux 22 LR à la maison, tout le monde est arrivé à la conclusion que c’était moi (alors que, très accessoirement, avec ma licence de tir, je pouvais aller tirer un coup dans n’importe quel club de tir de France et de Navarre, du pistolet à plombs au fusil d’assault). D’où à mon avis, les tergiversations sur à qui confier l’affaire. SRPJ de Versailles ou Gendarmerie. C’est la prévôté qui a gagné.

Donc, je disais, sans pression, peinard, l’inspecteur La Bavure me demande d’avouer, devant lui-même, un de ses collègue, et 3 gendarmes. Vous me croirez si vous voudrez, mais j’ai gentiment répondu à ce crétin fonctionnaire de la Grande Maison que

Non, je ne vais pas avouer quelque chose que je n’ai pas fait. Et que si vous aviez un peu prêté attention à ce que je vous ai dit pendant que vous foutiez le bordel dans ma chambre perquisitionniez, vous auriez noté que je veux soit intégrer la Gendarmerie Nationale pour être le patron du GIGN (rien que ça :D), soit intégrer la Police Nationale, pour le 36. Donc votre tentative là… (et me tournant vers le chef de brigade). Dites, je peux sortir 5 mn m’en griller une ?

Autorisation accordée, après m’avoir clairement fait comprendre que j’aurai une très mauvaise idée que de quitter son champ de vision. Une fois la cigarette fumée, et après encore un moment à avoir patienté dans MaVille, nous sommes transportés vers la gendarmerie de Sous Préfecture, où mon père et ma sœur nous attendent.

C’est là que le grand cirque commence. Nous sommes interrogés dans des pièces différentes, et on nous pose mille fois les mêmes questions, sous différentes variantes. Le capitaine qui s’occupe de moi, principale suspect, me fait parler de mes cours, de ce que je veux faire plus tard, de mon hobby de moniteur de tir, etc… Le tout entrecoupé de pauses. Et, au détour d’une pause…

Au détour d’une pause [Roulement de tambour, suspense insoutenable]

Mon père demande au gendarme qui s’occupe de lui s’il dispose d’un rapport météo pour les deux demi-journées en question. THE BOMBE…. Regard interloqué et teinté d’incompréhension des gendarmes entre eux, puisque nous étions tous dans la même pièce.

Mais, pourquoi un rapport météo ? Nous avons les constatations balistiques, c’est suffisant.

Euh non, pas dans le cas d’une 22 LR. Car voyez-vous, le 22 Long Rifle est l’un des plus petit calibre d’arme à feu. Utilisable avec un pistolet, un revolver ou une carabine, cette ogive est très légère, et le moindre coup de vent peut la faire dévier de plusieurs centimètres (croyez-moi, c’est une putain de galère sur 50 mètres libre). Il ne suffit pas de mettre une tige dans un trou pour voir la direction du tir (Méthode scientifique validée par Horatio Caine) et de croiser la direction approximative obtenue avec le fichier des personnes détenant des armes à feu. Quand je vous dit… THE BOMB. Mais c’est pas fini.

Voilà du calibre 22LR

Voilà du calibre 22LR. C’est vraiment pas bien gros comme pruneau (MAIS ça va très loin, ne DECONNEZ JAMAIS avec ça à la campagne, au mieux c’est une vache, au pire…)

Le paternel, trouvant que la situation commence à le gonfler sévère (bah oui, d’une, un des deux samedi il était en train de bosser à son bureau dans sa chambre, et il aurait donc vu si j’étais passé « emprunter » le DES 69, et de deux, l’autre samedi, j’étais en bac blanc de compta) demande au capitaine de la brigade s’il peut se faire cautionner par quelqu’un.

L’OPJ, quoi que pas obligé, accepte. La tête qu’il a fait quand il a entendu « [NOM D’UNE BRIGADE DE LA MORT QUI TUE] Bonjour ». Bah oui, disons que, grâce aux potes du Club de Tir, on connaissait pas mal de monde. Bref, entre ça et l’histoire de la météo, le capitaine commençait à se poser de sérieuses questions…

Nouvel interrogatoire, à l’issue duquel le capitaine va rendre compte au larbin de permanence au substitut du Procureur de la République. Pour qui je reste le coupable idéal, et pour qui je dois rester en GAV, afin que je lui sois présenté dès le lendemain. Là ça commence à puer sévère. Sauf que…

Sauf que j’ai eu la chance de tomber sur un officier qui en avait dans la tête, et qui trouvait que ce que je disais était plutôt cohérent (putain, heureusement qu’il ne lit pas les Live-Tweet d’Alien Théory !!!), bref, qu’il n’avait pas le bon coupable en face de lui.

enseigne Gendarmerie isolée sur fond blanc

Honnêtement, je ne sais pas ce qui s’est passé, mais vers minuit, j’étais sorti et je rentrai chez moi. On m’a soufflé dans l’oreillette qu’il avait dû à nouveau contacter le permanencier du Parquet pour obtenir une levée de la garde à vue. Car je me rappelle juste qu’il a dit prendre la responsabilité de nous, et surtout me, laisser sortir. Par contre, je devais me tenir à sa disposition pour être à nouveau entendu.

La fin de l’histoire ?

Je n’ai pas été de nouveau convoqué. Par contre, on a su plus tard que la gendarmerie s’était enquit auprès de Météo France de l’exacte situation météorologique dans le quartier de MaVille ce jour-là, permettant d’obtenir un rapport balistique définitif, qui désignait l’origine des tirs sous un autre angle, donc un autre point d’origine. Derrière chez nous existait à l’époque un Foyer de Jeunes Travailleurs, qui a été perquisitionné un jour, et où ont été trouvé deux fusils à lunette, à silencieux intégré, de calibre… 22LR. Pile dans l’axe de tir.

Quant aux deux connards… pardon… aux deux inspecteurs qui jouaient les cadors ? Mon paternel et ses amis n’ont que moyennement apprécié leur attitude, arrogante et surtout sans aucun sens élémentaire de ce que pouvait être une enquête de police judiciaire. Ils moisissent peut être encore dans un sous-sol d’archives quelconques.

Aujourd’hui, je ne peux que remercier ce gendarme qui a su se poser des questions, non pour faire du chiffre d’une inculpation en plus, mais parce que la vie d’un jeune homme était en jeu. Ceux de MaVille aussi, qui ont su écouter, alors que l’on patientait pour savoir où était les auditions. Quant aux deux clampins, grâce à eux, je me suis juré que si j’étais flic un jour, jamais je ne devrais me comporter ainsi, que toujours je devrais garder un œil critique, prendre du recul. Car enquêter, c’est à charge, mais aussi à décharge. Enfin, je me rends compte que, à l’époque, j’aurai bien aimé être assisté par un avocat. Parce que seul dans la cage aux lions, c’est flippant (alors même que des flics, j’en voyais tous les jours au club, et que je savais comment ça se passait).

PS : et les deux rigolos, j’aurai du faire comme Tyrion L., et demander un duel judiciaire… Voilà mes derniers cartons, il y a deux/trois ans, après près de 10 ans sans avoir touché un 9 para…

On notera le mauvais placement des pieds, qui fait que tout est regroupé sur la droite (distance 15 mètres)

On notera le mauvais placement des pieds, qui fait que tout est regroupé sur la droite (distance 10 mètres)

On corrige et hop, c’est déjà mieux centré :p (Distance 15 mètres)